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33o [l587] JOURWAL
voient pas vaillant cinq sols, et maintenant étoient riches de cinq ou six cent mil écus; qu'il y avoit à craindre une sédition, criant le peuple tout haut qu'on lui voloit son bien pour le donner à je ne sçay quels mignons, vrayes sangsues et pestes de Ia France; que lui seul avoit levé plus de deniers > depuis qu'il étoit Roy, que dix de ses prédécesseurs en deux cents ans : et ce qui étoit le pis, l'on ne sçavoit où le tout étoit allé, le peuple ne s'en étant senti soulagé ni amandé, et au contraire beaucoup pis, et en plus piteux et pauvre état qu'il n'avoit jamais été ; que si les finances étoient bien duement et loyaument administrées, il y auroit assez et trop pour subvenir à la nécessité de ses affaires; que ceux qui lui donnoient conseil de prendre les deniers des payemens des rentes de la ville étoient gens méchans, sans foy, sans loy, non vrais François, mais ennemis jurez de son Etat et de la France. Et plusieurs autres raisons qu'ils déduisirent hautement, avec beaucoup d'éloquence, de gravité et de liberté ; nonobstant lesquelles le Roy, après les avoir ouy fort attentivement et patiemment, leur répondit, avec une grande majesté entremeslée toutesfois de colère, comme il parut à son visage : « Je connois aussibien et mieux que vous « la nécessité de mon peuple, l'état de mes affaires et « finances; et j'y sçaurai donner bon ordre, sans que « vous en empeschiez plus avant. Rendez justice au « peuple, qui crie et se plaint de vos injustices, « [ n'ayant les oreilles rebatuës d'autres choses. ] Ma « résolution est, quoy qu'à regret, de prendre sur les « rentes les cinq cent mil écus dont j'ai nécessairement « affaire, si vous n'avez quelques autres prompts « moyens pour me les faire toucher. »
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